Écoresponsabilité

Qu’est-ce qui nous attend ?

Par Ruari McCallion

Octobre 2021

L’avenir des usines et des engins de manutention

L’avenir des usines et des engins de manutention

L’essor de l’intelligence artificielle et la nécessité d’un développement durable vont beaucoup influencer la conception et la configuration des futures usines et, par extension, des matériels de logistique. Ruari McCallion enquête…

Est-ce que 2020/21 restera dans les mémoires comme les années du changement ou comme les années de crise qui ont accéléré le changement ? Les problèmes, les crises et les pressions multiples se sont associés pour définir des changements à opérer dans les chaînes d’approvisionnement et les procédés de fabrication et de logistique. Parmi les tendances les plus tenaces on trouve l’Industrie 4.0, l’essor du développement durable et les pressions législatives visant à réduire la pollution et la consommation d’énergie.

Le secteur de la fabrication s’éloigne peu à peu de la production de masse pour devenir une personnalisation de masse, voire une production « batch of one » : des produits standard dotés d’un degré élevé de contenus et de propriétés sur mesure.

De plus en plus de fabricants de produits alimentaires et de boissons disposent de technologie permettant de cultiver hors saison et d’augmenter la production des cultures et des élevages.

Un certain nombre de changements étaient en cours mais la covid-19, notamment, a accéléré la cadence.

La façon dont les produits sont fabriqués est également en plein bouleversement. L’idée de Microfactory d’Arrival, fabricant de véhicules commerciaux, en est peut-être l’exemple le plus extrême actuellement (voir encadré). Cependant, la connectivité accrue, la personnalisation, l’automatisation, le suivi des performances en temps réel par les « jumeaux numériques », les nouvelles technologies comme l’additive manufacturing (également appelée « impression 3D »), la conception générative et, surtout, les « usines connectées », vont modifier le paysage de la fabrication et de la distribution. Cette évolution aura aussi un impact sur la logistique, que ce soit sur la taille, la distribution et la fonction des entrepôts ou sur la conception des matériels de manutention qui s’y trouvent.

Juha Nyman, Director, Solutions Strategy and Business Development, Cat® Lift Trucks EAME

Juha Nyman, Directeur, Stratégie des solutions et développement commercial, Cat® Lift Trucks EAME

« La personnalisation de masse et la nécessité de livrer les commandes très rapidement modifient la chaîne logistique », affirme Juha Nyman, Directeur, Stratégie des solutions et développement commercial pour Cat® Lift Trucks en EAME. Une chaîne d’approvisionnement d’envergure mondiale ne représente pas l’avenir. Des pièces pré-assemblées doivent désormais être disponibles au plus près du client afin de permettre un assemblage final rapide et une livraison le lendemain, ce qui se rapproche de l’idée de Lean Manufacturing.

« Je pense qu’il faut se préparer à cela, ainsi qu’à une personnalisation toujours plus poussée, au cas par cas. C’est ça qui façonne la chaîne logistique en Europe, bien plus que les coûts de la main d’œuvre locale », explique-t-il. La pandémie de covid-19 a fait prendre conscience aux entreprises de logistique et aux fabricants qu’ils ne peuvent plus se permettre de dépendre autant de la main d’œuvre humaine, qui peut à tout moment partir en congés maladie, par exemple. Toutes ces pressions orientent vers une automatisation accrue, dans la manutention comme dans d’autres secteurs.

« Je pense qu'il faut se préparer à cela, ainsi qu’à une personnalisation toujours plus poussée, au cas par cas. C’est ça qui façonne la chaîne logistique en Europe, bien plus que les coûts de la main d'œuvre locale ».

Juha Nyman

« Nous avons besoin d’un équipement doté d’interopérabilité, capable de se connecter et de s’intégrer facilement aux systèmes de gestion », affirme Jani Mahonen, Directeur de l’entreprise, Services numériques et développement de solutions pour AEME. La gestion et les opérations doivent être informatiquement compatibles. Tout comme les machines doivent pouvoir communiquer entre elles sur la zone de production d’une entreprise intelligente, il en va de même pour le suivi, le déballage des palettes, le chargement et le déchargement des rayons, le prélèvement, la dépose et la prise de palette, qui doivent être en mesure de communiquer au sein des systèmes de gestion de l’entreprise. La question qui se pose est alors : jusqu’où les systèmes peuvent-ils être automatisés ? Peut-on envisager des entrepôts sans le moindre opérateur ?

« C’est possible dans certains cas, comme l’industrie de la boisson, où vous avez des charges uniformes très standardisées, des quantités très importantes et toute la chaîne logistique sous contrôle », poursuit Jani Mahonen. Pourtant, la tendance est peut-être totalement inverse. La taille des lots devient si réduite que les opérations sont sous-traitées à de gros opérateurs logistiques, avec des périodes contractuelles suffisamment courtes pour décourager un investissement significatif dans une automatisation lourde.

Il faut également plus de flexibilité en termes de manutention, de sorte que les entrepôts ne doivent être ni totalement automatisés, ni pas automatisés du tout ; il faut trouver un juste milieu. Même l’usine intelligente dotée de la chaîne logistique la plus intégrée possible devra user de « cobotisation » : des êtres humains, des robots et des systèmes d’automatisation qui collaborent. Mais d’autres idées viendront encore changer la donne et il faudra s’adapter quoiqu’il arrive.

« Il existe toutes sortes de nouvelles idées, notamment dans les secteurs de la logistique et de la fabrication, mais il est assez difficile de prédire laquelle d’entre elles va gagner », déclare Juha Nyman. D’un point de vue historique, les vainqueurs se repèrent avec le recul, après quelques années. Il faut trouver un équilibre entre crainte de l’avenir, c’est-à-dire la suppression d’emplois, et les opportunités.

Pour Jani Mahonen « l’équilibre se situe plutôt du côté optimiste ».

« L’automatisation fonctionne mieux lorsque vous pouvez standardiser le process, mais la plupart du temps, il y a des exceptions : les marchandises qui arrivent abîmées ne peuvent pas être gérées par un process standard ou autre », affirme Juha Nyman. « En matière de manutention, rien n’est plus flexible qu’un être humain. Ce qui me laisse à penser qu’il y aura toujours des emplois en logistique à l’avenir ».

Jani Mahonen, Digital Services and Solutions Development, Cat® Lift Trucks EAME

Jani Mahonen, Services numériques et développement de solutions, Cat® Lift Trucks EAME

“We need equipment with interoperability, that can connect and integrate with management systems easily,” said Jani Mahonen, the same organisation’s Director, Digital Services and Solutions Development for EAME. Management and operations need software compatibility. Just as different machines have to be able to speak to each other on the production floor of a smart factory, so do tracking, depalletising, shelf loading and unloading, pick, place and palletising equipment need to be able to communicate, within the organisation’s management systems. The question is, then: how far can systems be automated? How far are we from ‘lights-out’ warehouses? “It looks quite likely in the case of, for example, the beverage industry, where you have very standardised, uniform loads, very high quantities and the whole logistics chain under your control,” Jani Mahonen continued. Beyond that, the trend is maybe the other way. Batch sizes are becoming so small and operations are outsourced to large logistical operators – but with contract periods that are sufficiently short that they discourage significant investment in fixed, heavy automation. They also need some flexibility in their materials handling so warehouses should neither be fully automated nor non-automated; they should be mixture. Even the most fully integrated, smart logistical chain, smart factory will need ‘cobotisation’; with human beings, robots and automation working together. But there are going to be ideas that disrupt, and the challenge will be to adapt to whatever happens. “There are all sorts of novel ideas, including in the areas of logistics and manufacturing – but it’s rather difficult to predict which one of them is winning,” said Juha Nyman. Historically, the winners seem to be obvious in hindsight, after a few years. There is a balance to be struck between fear of the future – potential job losses – and the opportunities. “The balance is very much on the optimistic side,” said Jani Mahonen. “Automation works best where you can standardise the process but, almost everywhere, there some exceptions: incoming goods aren’t in good shape, they can't be handled with a standard process or something,” said Juha Nyman. “No one's as flexible in handling those as a human being. That makes me believe there will still be jobs for people in logistics in the future.”

Arrival : l’usine intelligente de l’usine intelligente.

Arrival Ltd conçoit et fabrique des véhicules électriques. Le transporteur UPS a commandé une flotte de 10 000 fourgons Arrival pour ses opérations aux États-Unis.

La méthode classique pour une telle commande consisterait à augmenter la production des usines existantes. Arrival adopte une approche différente. Elle déploie des Microfactories (micro-usines) à proximité des marchés concernés et a recours aux compétences et à la main d’œuvre locales.

Ces usines sont fortement automatisées, mais la vraie différence réside dans leur configuration et leur évolution future. Les machines sont connectées et toute l’usine fait appel à l’IA (intelligence artificielle) afin de s’adapter et d’améliorer les performances et la productivité.

« Le meilleur moyen de résoudre des problèmes informatiques complexes, c’est de donner aux ordinateurs la capacité d’apprendre sans être explicitement programmés », affirme Doug Morton, responsable de la stratégie informatique chez Arrival. « Si vous définissez les règles et le résultat souhaité, vous entraînez la machine à faire usage des données pour optimiser tout ce qui se trouve entre les deux ».

Ainsi, les usines et les lignes de production vont adopter un look quelque peu étrange à nos yeux.

Le look de la Microfactory d’Arrival se distingue déjà car la production est organisée en carrés, qui viennent remplacer les lignes d’assemblage traditionnelles.

« Avec la Microfactory, nous renonçons à la volonté de connaître clairement et à l’avance les performances de chaque opération », explique Doug Morton. « Bien que les humains s’adaptent pour contourner les difficultés rencontrées sur les process de production existants, nous voyons là une opportunité très convaincante de venir à bout des lacunes de l’environnement de production ».

 

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Fourgons UPS pour les États-Unis – produits d’Arrival Microfactories.

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