Les secrets de la surveillance de la sécurité

Les performances sécurité en matière de levage

La sécurité liée aux chariots élévateurs est un ensemble complexe et multi-facettes de formation, de procédures d’entreprise et de contrôle permanent, où les compétences et capacités du responsable sont essentielles. Quelle part de ces capacités est innée, quelle part peut être enseignée et comment les bonnes entreprises peuvent-elles améliorer leur performance ?

Gay Sutton

La zone de manutention d’Air France-KLM-Martinair Cargo, à l’aéroport Schiphol (Amsterdam), est un site impressionnant. D’une superficie d’environ 40 000 m², elle ressemble à une fourmilière. Quelques 850 000 tonnes de fret la traversent chaque année, marchandises entrantes, sortantes ou en transit. Elles y sont déplacées par une flotte d’environ 150 chariots élévateurs et tracteurs, ainsi que par quelques voiturettes de golf et plateformes aériennes, tous gérés et entretenus par Crepa, le concessionnaire Cat® lift trucks du Benelux. En plus des chargements habituels, des marchandises aussi variées que des aliments frais, des ordinateurs, des médicaments, des fleurs, des tableaux et même des éléphants y sont transportées par des équipes de spécialistes dévoués.

Comme toute fourmilière, ce pôle est hautement organisé et efficace. « Notre objectif principal est de respecter les promesses de livraison et de nous engager auprès de nos clients, explique Koen Wiegand, responsable des projets chez Air France-KLM-Martinair Cargo. Nous avons pour but de livrer les marchandises à temps et en parfait état. Pour cela, nous ne faisons aucun compromis en matière de sécurité. »

« D’une superficie d’environ 40 000 m², elle ressemble à une fourmilière. Quelques 850 000 tonnes de fret la traversent chaque année, marchandises entrantes, sortantes ou en transit. »

L’aptitude à la gestion

Alors, les bonnes capacités de gestion sont-elles innées ou peuvent-elles être enseignées ? C’est un sujet de discussion pour de nombreuses entreprises. Steve Clark, président du groupe Vente au détail et Distribution à l’Institution de santé et de sécurité au travail (IOSH) explique : « Un bon encadrant doit être capable de comprendre ce qui motive le comportement des personnes sur leur lieu de travail, et de pouvoir faire face rapidement aux difficultés dans un environnement dynamique, où tout peut arriver. »

De retour à la zone d’Air France-KLM-Martinair Cargo, il est perçu comme essentiel de pouvoir disposer de personnels encadrants et de responsables ayant la bonne approche et les compétences nécessaires. C’est pourquoi les aptitudes de tous les postulants à ce rôle sont évaluées avant embauche. « Nous recherchons des collaborateurs ayant une autorité naturelle, ainsi que d’excellentes compétences de sécurité et de gestion des personnes, explique Koen Wiegand. Une partie de ces compétences consiste à pouvoir communiquer correctement, à motiver les employés en leur faisant des compliments quand les choses se passent bien, à gérer pro-activement les problèmes de sécurité et les risques liés à l’entreprise, tout en donnant des explications claires quand les choses ne se passent pas bien. »

« Un bon encadrant doit être capable de comprendre ce qui motive le comportement des personnes sur leur lieu de travail, et de pouvoir faire face rapidement aux difficultés dans un environnement dynamique, où tout peut arriver. »

Une fois les bonnes personnes embauchées aux rôles d’encadrement, Roger Bibbings, de la Société royale de prévention des accidents, pense qu’il y a trois choses que les entreprises doivent appliquer pour améliorer la sécurité des opérations de manutention et de conduite de chariots élévateurs : des dirigeants compétents ; une participation de la main-d’oeuvre par l’autonomisation, la formation et la culture d’entreprises ; des conseils d’expert provenant de spécialistes.

Formations en sensibilisation à la sécurité

Tout le monde convient que les encadrants et les responsables ont besoin de bien connaître le fonctionnement des chariots élévateurs, de savoir ce qui constitue des conditions et comportements sûrs, et de bien reconnaître et corriger ce qui est dangereux.

Mentor Training a formé un partenariat avec Impact Handling, concessionnaire britannique de Cat Lift Trucks. Non seulement cet établissement forme quelque 38 000 caristes par an, mais il gère des cours personnalisés, qui proposent des formations théoriques et pratiques concernant le fonctionnement des chariots élévateurs, des démonstrations de comportements et contextes sûrs et risqués, ainsi qu’un rappel bien senti sur les responsabilités légales des responsables et sur les réglementations. Cet ensemble de connaissances les arme et les incite à repérer et corriger les comportements à risque. Il est à noter que l’application des normes de sécurité nécessite une surveillance continue, ainsi que de bons processus et politiques d’entreprise.

« Généralement, les caristes suivent des formations chariots et passent leurs examens de conduite avec succès. Cependant, de retour sur leur lieu de travail, il y a le risque de prendre de mauvaises habitudes menant à un fonctionnement dangereux, explique Stuart Taylor, formateur chez Mentor Training. La seule façon de réduire les risques est que les responsables et les surveillants résolvent les pratiques et comportements dangereux au fur et à mesure qu’ils les constatent. Les procédures de sécurité soigneusement préparées ne sont utiles que si le personnel encadrant les font appliquer. »

L’adoption de bonnes procédures de sécurité et leur contrôle régulier ont un impact financier positif avéré sur l’entreprise. Une des entreprises avec lesquelles Mentor Training travaillait subissait des frais en raison de marchandises endommagées : « L’entreprise a consacré du temps à analyser ses pratiques, ainsi qu’environ 50 000 £ pour réaliser une formation spécifique surle positionnement des palettes. Grâce à ces deux éléments clés, elle a économisé plus de 250 000 £ en réduisant les marchandises endommagées, sur une période de deux ans. » Et ce chiffre n’inclut pas les économies supplémentaires réalisées en termes de baisses d’incidents.

Des bases solides en matière d’organisation

Les organisations sûres sont généralement celles qui ont des procédures de gestion bien définies. L’entreprise où Steve Clark est employé commence par s’assurer que le personnel comprend exactement ce qu’on attend de lui : « Nous avons des documents écrits sur les rôles et responsabilités de chaque poste de l’entreprise. Ces documents exposent notamment tous les éléments de sécurité et définissent clairement ce que nous attendons de chacun. »

Chaque tâche nécessite des compétences essentielles. Tous les postulants font l’objet d’une évaluation concernant ces compétences et leur expérience. Nous ne faisons pas de suppositions à partir du précédent poste occupé. La formation initiale est complétée par des ateliers qui proposent des connaissances solides sur la sécurité liée aux chariots élévateurs. Les responsables sont aidés par une procédure de conseils et de discipline reposant sur des documents expliquant chaque étape pour résoudre les problèmes de respect des normes de sécurité.

Les normes sont maintenues au niveau requis grâce à des procédures de surveillance définies. « Nous effectuons régulièrement des évaluations du personnel, poursuit Steve Clark. Nous avons mis en place un régime d’observation continue appelé “observation des caristes MHE”, qui prévoit que le responsable ou le surveillant observe 10 % du personnel tous les mois, en vérifiant une liste de comportements, techniques et processus. Ainsi, nous pouvons constamment vérifier et maintenir la performance. Il est intéressant de noter qu’il y a moins d’incidents quand nos collègues sont pleinement occupés. Quand ils ne travaillent pas à leur pleine capacité, ils semblent moins concentrés sur leur travail. »

Les points de culture spécifiques

Pour Air France-KLM-Martinair Cargo, la formation et la participation du personnel sont essentiels afin de créer une culture sécurité prédictive et proactive. Le personnel doit identifier les situations potentiellement dangereuses. Ces situations doivent être soigneusement étudiées et des mesures préventives doivent être mises en place. S’il y a eu un incident / accident ou si un cariste a eu un comportement dangereux, le responsable doit étudier ce qui s’est passé et en parler directement avec lui, afin qu’il comprenne ce qu’il a fait et qu’il corrige son comportement.

Pour maintenir la sensibilisation à la sécurité, la communication est extrêmement importante. Air France-KLM-Martinair Cargo utilise pour cela un mélange d’outils de communications, de campagnes internes ciblant la sécurité, de bulletins réguliers, de réunions trimestrielles pour tout le personnel et de réunions quotidiennes à chaque changement d’équipe.

Selon Roger Bibbings (RoSPA), toutes les personnes de l’organisation sont responsables de la sécurité, dans le cadre de leur fonction. Ce système fonctionne vraiment bien à Schiphol. Les caristes pensent constamment à la sécurité. Ils ne craignent pas de rappeler à leurs responsables qu’ils ne doivent pas aller dans l’atelier sans porter des chaussures de sécurité et une veste luminescente.

Amélioration continue

Bien sûr, il y a parfois des accidents, notamment dans les zones à évolution rapide. Chaque accident doit être étudié et des mesures doivent être prises. Air France-KLM-Martinair Cargo a poussé l’idée plus loin, en mettant en place des processus pour que le personnel signale de manière ouverte toute situation qu’il juge dangereuse. Ainsi, l’organisation soutient et facilite constamment les comportements plus proactifs concernant l’amélioration de la sécurité. « Tout le monde est responsable de la sécurité, poursuit Koen Wiegand. Ce système permet d’améliorer la sensibilisation et d’obtenir un environnement de travail plus sûr. »

Les palettes de la zone de chargement peuvent être de deux longueurs : 1,20 m pour les europalettes, 2 m pour les autres. L’un des dangers, c’est que les fourches, après avoir traversé les petites palettes, dépassent de l’autre côté, ce qui peut non seulement blesser quelqu’un mais aussi endommager les palettes empilées à proximité. Après étude de ce problème, les caristes eux-mêmes ont trouvé une solution efficace : des marques colorées sur les fourches, pour montrer à quel endroit arrêter d’avancer les fourches sous les petites palettes. »