Économie

Quel crédit lui accordez-vous ?

Avec la fin de la crise, la réussite à long terme ou l’échec de nombreuses entreprises dépendra de leur capacité à investir maintenant. Mais les banques en ont-elles fait assez pour libérer les prêts ?

Gay Sutton sépare la réalité du mythe.

L’ordre du monde, établi de longue date, était soudain renversé. Sur toute la planète, des banques se sont retrouvées démunies, plongeant le monde dans une récession qui a même ralenti la croissance effrénée de l’économie chinoise. Après des années de prêts à outrance, un grand nombre de grandes banques internationales ont dû être renflouées par leur État respectif et, à présent, ont été nationalisées en partie. Entre-temps, des banques comme Lehmann Brothers et les banques islandaises malchanceuses ont tout simplement fait faillite. Seules quelques-unes, plus conservatrices et prudentes, ont traversé la crise sans abandonner leur indépendance : elles ont été secouées, mais ne se sont pas effondrées.

Deux ans et demi plus tard, alors que l’économie de l’Europe tente de reprendre du poil de la bête, le système bancaire a subi d’importantes restructurations. De nombreux États ont lancé des initiatives pour libérer les prêts bancaires aux PME. Dans l’ensemble, les sociétés se sont concentrées sur le remboursement de leurs dettes et l’encaissement de leurs bénéfices. Mais, alors que l’économie commence à se redresser et que les sociétés cherchent à profiter de cette reprise, beaucoup signalent qu’elles ont des difficultés à trouver un financement auprès des banques, en se plaignant d’exigences toujours plus fortes et de taux d’intérêt élevés.

« Après des années de prêts à outrance, un grand nombre de grandes banques internationales ont dû être renflouées par leur État respectif et, à présent, ont été nationalisées en partie. »

« Je crois que l’on peut parler de spirale de négativité, explique Nick Badman, président du Peter Cullum Centre for Entrepreneurship à Cass Business School : on voit de petites entreprises se réunir et dire qu’il est scandaleux que les banques ne prêtent pas d’argent. Je pense que cela peut en décourager certains de demander un prêt que, peut-être, ils auraient obtenu s’ils l’avaient demandé. » Alors, les banques disposent-elles de fonds et sont-elles prêtes à les investir une fois de plus ?

Ulrich Schürenkrämer, coresponsable des entreprises du marché intermédiaire chez Deutsche Bank Allemagne, a confirmé que, sur l’argent attribué aux prêts pour les Mittelstand (l’équivalent des PME), environ 16 milliards € n’ont pas été demandés. «Cela signifie que nous pouvons encore accorder quelque 16 milliards €. Nous sommes certainement ouverts aux propositions et nous disposons de suffisamment de fonds pour financer le redressement»

 

Andy Grisdale, responsable de la stratégie à HSBC Commercial Banking Royaume-Uni, commente : « Nous avons été prêts à accueillir de nouveaux projets au cours des deux dernières années, comme en atteste notre bilan, qui a progressé de 4,2 % au cours des 12 derniers mois. À présent, nous assistons aussi à une accélération de la demande.»

Getting credt in a recession

Deutsche Bank, Francfort, Allemagne

ien entendu, HSBC a maintenu sa liquidité et son capital tout au long de la crise, sans avoir besoin d’un renflouement de l’État. Pourtant, la banque NatWest RBS, bien que nationalisée en partie, semble également prête à accorder des prêts. « Nous avons prêté environ 30 milliards £ (34 milliards €) au cours des 12 derniers mois, selon Ibbetson. Cela représente environ 100 millions £ (113 millions €) par jour pour les PME. Nous voulons bien accorder des prêts, mais la demande est plus faible que ce que nous le voudrions. »
Si les fonds sont disponibles pour des prêts, pourquoi semble-t-il si difficile de les obtenir ? Les politiques de prêt ont-elles changé ?

« Nos directives de prêt n’ont pas changé matériellement au cours des deux dernières années, selon Andy Grisdale. Mais sommesnous plus rigoureux ? Absolument. Il existe de nombreuses entreprises fragiles et les évaluations sont un peu plus difficiles à réaliser. Pour expliquer ceci dans une perspective de rendement ou de risque, avec les marges que nous obtenons des entreprises concernant le revenu correctif, nous ne pourrions pas supporter l’échec de plus d’une ou deux entreprises sur cent. C’est une position très différente par rapport à la participation, où l’on peut probablement se permettre l’échec d’environ 20 % des entreprises. Ainsi, bien que nous ayons très envie de prêter de l’argent, les entreprises doivent démontrer leur capacité à rembourser cette dette. Il ne s’agit pas seulement d’avoir des garanties, il faut avoir la possibilité de rembourser. »

De plus, les banques sont obligées de réformer leurs opérations auprès des entreprises et de prouver leur capacité à faire des transactions en passant les stress tests exigés par le Comité européen des superviseurs bancaires. « Par certains aspects, les banques sont dans une situation plutôt schizophrène, explique Nick Badman. D’un côté, on les incite à reconstruire leur bilan comptable, ce qui signifie qu’elles doivent être prudentes en choisissant à qui elles prêtent après la période précédente de prêt tout à fait extravagante. D’un autre côté, les politiciens les surveillent de près, en leur demandant de prêter plus d’argent, notamment aux petites et moyennes entreprises. Il est très stressant de se retrouver entre les deux. »

« Ainsi, bien que nous ayons très envie de prêter de l’argent, les entreprises doivent démontrer leur capacité à rembourser cette dette. Il ne s’agit pas seulement d’avoir des garanties, il faut avoir la possibilité de rembourser. »

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Financement des banques à l’intention des entreprises européennes.

Le coût des prêts est l’autre gros problème, notamment en raison du fait que le taux d’intérêt de base est à son plus bas de mémoire ’homme : les archives de la Banque d’Angleterre montrent que, jusqu’à la crise de 2008, le taux d’intérêt de base n’était descendu qu’à 2 %, et cela une seule fois au cours des 107 dernières années, mais il se situe maintenant à 0,5 % au Royaume-Uni. Du point de vue des banques, une partie importante du coût des prêts se calcule par rapport au risque lié aux prêts, ce qui est rigoureusement analysé : plus le risque est élevé, plus le taux d’intérêt est élevé.

« Nous avons un instrument commun, explique Schürenkrämer de la Deutsche Bank. Pour commencer, nous examinons l’entreprise selon divers critères concrets et théoriques, puis nous la notons. Nous avons besoin de vérifier que l’entreprise est en mesure de rembourser le financement que nous lui proposons, ce qui nécessite une analyse très individuelle. Ensuite, nous sommes capables de décider quel montant nous lui prêterons et sous quelles conditions.

 

Nous essayons de travailler de manière tout à fait transparente. Nous donnons à nos clients une grille de taux, pour qu’ils puissent voir quel type de taux d’intérêt ils peuvent espérer selon leur degré de solvabilité. »
En conclusion, il y a de l’argent disponible dans les banques, qu’elles sont désireuses et capables de prêter. Mais le processus d’évaluation de risque est très rigoureux : les prêts ne sont autorisés que pour de bonnes perspectives commerciales, avec une preuve de retour sur investissement et un bilan qui atteste de la capacité à rembourser le prêt.

De plus, il est peu probable que les banques relâcheront leur stratégie de prêt dans le futur immédiat.

 

« Mais le processus d’évaluation de risque est très rigoureux : les prêts ne sont autorisés que pour de bonnes perspectives commerciales, avec une preuve de retour sur investissement et un bilan qui atteste de la capacité à rembourser le prêt. »

« Actuellement, il existe beaucoup d’insécurité dans le monde, avec les événements au Japon et dans le monde arabe. Quand on regarde la BBC ou CNBC, on peut voir que, par certains aspects, il y a beaucoup de problèmes, conclut Schürenkrämer. Mais, par d’autres aspects, il y a beaucoup de potentiel. La question la plus importante est de savoir si les entreprises sont capables de s’adapter à ces nouvelles situations et d’en profiter. De notre point de vue, si le dossier d’une entreprise se distingue et montre de bons retours sur investissement, nous pouvons la financer sans problème. »

Conseils pour obtenir un financement

Pour les petites entreprises, en particulier, une demande de financement peut s’avérer ardue. « La préparation est essentielle, selon Brian Capon, de la British Bankers Association. Elle démontre à la banque que vous connaissez bien votre entreprise, que vous connaissez bien la conjoncture actuelle et que vous contrôlez la situation. C’est ce que la banque souhaite entendre. Cela ne garantira pas que vous obtiendrez le financement mais, au moins, vous aurez fait de votre mieux. »

  1. Proposition structurée – proposition bien argumenté, étayée par des études de marché et des preuves selon lesquelles tous les coûts et tous les facteurs ont été pris en compte.
  2. Remboursement – preuves selon lesquelles l’entreprise génèrera suffisamment de revenus pour rembourser le prêt et répondre à d’autres engagements financiers. Alternative si le retour sur investissement ne se matérialise pas.
  3. Évaluation des risques – éléments à examiner : type et taille de l’entreprise, concurrence directe, antécédents commerciaux, antécédents en matière de crédit, rapports tels que le niveau d’équipement de l’entreprise et périodicité d’inventaire.
  4. Sécurité – la détermination à apporter des garanties démontre l’engagement envers la réussite de l’entreprise.

 

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